La Pologne est-elle en train de perdre son poids international?

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La politique étrangère n'échappe pas au changement qui caractérise l'évolution politique en Pologne ce dernier temps. Comment analyser le nouveau positionnement international du plus grand pays de l'Europe centrale?

La Pologne vers l'isolement

05/01/2017 - 22:20
Depuis l’arrivée au pouvoir du parti nationaliste Droit et justice (PiS) en octobre 2015, la Pologne s'est aliénée d'un nombre croissant d'acteurs sur la scène internationale. Elle se permet non seulement de refroidir ses relations avec certains États, mais d'entrer en conflit ouvert avec d'autres. Vers quoi tend-elle avec une telle politique?

La Pologne, autrefois figure de proue en Europe centrale et orientale, a perdu cette position. Aujourd'hui, les affaires étrangères polonaises sont extrêmement politisées, la politique étrangère repose essentiellement sur un repli défensif et un isolement. Au nom de la construction de l'image d'un État fort et souverain, son action dérive en démonstration de force inutile. Elle se dresse et s'oppose à tous ceux qui pourraient être en mesure de contester sa position sur la scène internationale. Son attitude ressemble de plus à celle d'un petit enfant qui se fâche et tape du pied chaque fois que les évènements ne s'alignent pas sur ses attentes. En conséquence, l'image de la Pologne en Europe est tout le contraire de celle qui était attendu. Certains sont irrités et la pointent du doigt, d'autres commencent à voir la Pologne comme irresponsable et capricieuse.

Le Triangle de Weimar non-équilatéral

Le Triangle de Weimar - ce regroupement informel de la coopération trilatérale entre la France, l'Allemagne et la Pologne - est en pleine crise. Il n'est pas surprenant qu'entre ces trois États, le rapport de force ne soit pas équilibré. Dans la situation actuelle de l’Union européenne, ce sont l'Allemagne et la France, en tant qu'États les plus puissants et contribuant le plus au budget européen, qui ont le plus à dire en Europe. Et cela semble contrecarrer les ambitions du gouvernement polonais.

En dépit de la proximité géographique, les relations germano-polonaises n'ont jamais été au beau fixe et, même dans le cadre de l'appartenance commune à l'Union européenne, les conflits historiques se font toujours sentir. Ainsi, quand la chancelière fédérale allemande Angela Merkel appelait à l'acceuil des réfugiés en Europe en 2015, c'était surtout la Pologne et son allié, la Hongrie qui se gendarmaient sans hésitation contre l'initiative. Récemment, PiS a également détérioré ses relations avec la France, en annulant début octobre un contrat d'achats majeur de 50 hélicoptères Airbus d'une valeur de 3 milliards d'euros, négocié par le gouvernement précédent. C'est pour le moins incompréhensible puisque le contrat prévoyait qu'une partie de la production devait être assurée en Pologne, ce qui stimulerait aussi l'économie polonaise et créerait de nouveaux emplois. Par contre, le gouvernement a décidé d'acheter 21 hélicoptères américains. Où est la logique?

La Pologne – un casse-tête pour l'Union européenne

La Pologne est en position délicate vis-à-vis d’autres États, mais également d'institutions et organisations internationales dont elle fait partie. À ce titre, il faut rappeler le contentieux autour du Tribunal constitutionnel polonais. La Pologne, pour répondre aux critiques du Parlement européen, de la Commission européenne et du Conseil de l'Europe pour les modifications touchant au statut de Tribunal constitutionnel, a requis l'avis de la Commission de Venise. Cependant, le gouvernement de PiS n'a par la suite pas envoyé ses représentants à la réunion de cette Commission, en guise de protestation contre une institution qui serait partiale, «malhonnête» et «incompétente». L’incohérence est totale puisque, lorsque l'avis critiquant la Pologne avait été émis mi-octobre 2016, le gouvernement se défendit, en arguant que la Commission de Venise «ne prenait en compte que les arguments d'un seul côté du conflit complexe».

Ménager la chèvre et le chou

La Pologne s'éloigne de plus en plus du centre de gravité de l'Union européenne. En voulant se faire internationalement forte, elle se concentre sur l'engagement envers le Groupe de Visegrád et par conséquent résiste à plus d'intégration européenne. C’est une situation paradoxale, alors même que la création du Groupe de Visegrád en 1991 avait pour son objectif principal de se rapprocher aux États occidentaux. Douze ans après avoir atteint son but avec l’adhésion à l'Union européenne, la coopération au sein du Groupe est plus étendue que jamais, mais de plus en plus mal vue à Bruxelles. Le gouvernement polonais, en approfondissant ses relations - surtout avec la Hongrie - et en multipliant les désaccords avec les institutions européennes et les États occidentaux, risque de s'isoler au sein de l’Union. Alors qu'elle ait tout intérêt à mener une politique étrangère plus réfléchie. Pourquoi ne pas céder sur certains points qui la diffèrent trop des autres États et chercher des points en commun également au-de là du Groupe de Visegrád? L’entente serait possible même dans les sujets si sensibles que l’immigration. Comme les cas de l'Autriche et de la Bavière le montrent, le débat sur l'immigration semble pencher en faveur des plus conservateurs. Cela pourrait permettre de converger vers un compromis, à moins que la Pologne se montre, elle aussi, moins rigide sur sa position. Un tel changement d'attitude vers plus de coopération pourrait renforcer sa position sur la scène internationale et ne donnerait pas l'impression que la Pologne ne fait que s'opposer à tous. Un tel ajustement poserait les bases d'une politique étrangère plus pragmatique, et non intransigeante comme elle l'est maintenant. Sinon, tant PiS.

Cet article présente intentionnellement un seul parmi les différents points de vue existant sur cet enjeu. Son contenu ne reflète pas nécessairement l'opinion personnelle de l'auteur. Je vous invite à prendre connaissance de la philisophie de Duel Amical.

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